Succession

Les donations : panorama complet

Si la donation est le moyen d'anticiper sa succession en attribuant tout ou partie de ses biens de son vivant, il en existe plusieurs types qu'il convient de différencier en les étudiant séparément.

Cette procédure de transmission de son patrimoine résulte de la volonté manifestée par le donateur de se dessaisir d’une partie de ses biens au profit d’une autre personne. Elle fait partie de ce que le Code civil qualifie de « libéralité », sachant qu'une libéralité au profit d'un tiers ne peut être consentie que par donation ou par testament.

Donation

Un outil d'anticipation pour qui veut organiser sa succession

L'article 894 du même code définissant ce mode de transmission :« la donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée, en faveur du donataire qui l’accepte ».

Principales caractéristiques de la donation

  • Un effet immédiat (alors que le testament ne prend effet qu’au décès du testateur) – de ce fait le donateur peut se réserver l’usufruit du bien – le donataire ne devenant pleinement propriétaire qu’au décès du donateur ;
  • Un caractère irrévocable – sauf dans de très rares cas, il est impossible de revenir sur une donation (alors qu’un testament peut toujours être modifié) ;
  • Nécessite un acte notarié (le testament peut être rédigé de la main du testataire) ;
  • Exige l’acceptation du bénéficiaire dénommé « donataire » (le testament peut lui être refusé par le bénéficiaire) ;
  • Ne peut concerner qu’un bien possédé en propre (par testament on peut léguer un bien que l’on ne possède que partiellement – en indivision par exemple) ;
  • Ne peut porter que sur des biens actuels (nullité des dispositions concernant des biens futurs -cf. art. 943 du Code civil– le testament lui peut concerner les biens futurs du testataire).
  • Peut être consentie avec conditions à la charge du bénéficiaire ;
  • Les droits payés par le donateur ne sont pas considérés comme complément à la donation.

Conséquences de la donation sur la succession à venir

Le principe posé par l’article 843 est qu'est rapportable à la succession toute donation faite à un héritier, sauf lorsque celle-ci a été consentie hors part successorale.

  • 1. Donations rapportables à la succession

Est rapportable à la succession toute donation consentie sur la part réservée aux héritiers légaux (dénommée part réservataire ou encore réserve héréditaire) de la succession.

Il en est ainsi de celles consenties dans le cadre de ce qu’il est convenu d’appeler « avance d’hoiries » dont le but est de favoriser temporairement certains héritiers (souvent un ou des enfants).

Il sera tenu compte de ces avances dans le partage lors de la succession pour rétablir l’égalité entre les héritiers (sauf dans le cas où le bénéficiaire a désintéressé ses cohéritiers en leur versant une soulte correspondante).

  • 2. Donations non rapportables à la succession

Ne sont pas rapportables à la succession les donations qui s’imputent sur la part dont le donateur peut disposer librement pour favoriser un héritier ou un tiers et appelée « quotité disponible ».

Parmi les donations non rapportables, citons la donation « hors part » (aussi appelée « donation par préciput »), instrument idéal pour favoriser un enfant dans une fratrie.

Bon à savoir : seuls les donataires ayant la qualité d’héritier sont tenus du rapport à la succession. À l’inverse, toute personne ayant reçu une donation ne dépassant pas la quotité disponible n’est pas tenue de la rapporter.

Il en va de même pour les donations-partages et les présents d’usage qui n’ont pas à être rapportés à la succession du défunt.

Avantages des principales catégories de donations

Il existe différents types de donations et le donateur privilégiera celui qui correspond le mieux à son projet en fonction du degré de parenté (ou l’absence totale de lien) avec le donataire.

On distingue habituellement 3 catégories de donations :

  1. Celles partie intégrante d’un contrat de mariage: la donation entre époux. Irrévocables, elles présentent des risques en cas de divorce et sont donc à n’utiliser qu’avec d’infimes précautions.
  2. Celles ne prenant effet qu’au décès du donateur. C’est principalement le cas des donations entre époux.
  3. Celles à effet immédiat: donation-partage ; donation par préciput ; donation en avance d’hoiries ainsi que le don manuel. Toutes irrévocables, sauf dans les cas prévus par l’article 953 du Code civil (inexécution, ingratitude et survenance d’enfants).

La donation-partage

C’est la formule principalement choisie par les parents disposant de leurs biens au profit de leurs enfants.

Idéale pour partager de son vivant des patrimoines importants, c’est le mode de donation à retenir pour éviter désaccords ou mésententes au moment de la succession.  Chacun sait d’avance ce qui lui a été attribué et l’a accepté.

Si elle doit respecter l’égalité entre les héritiers, la donation-partage n’interdit cependant pas d’avantager l’un des héritiers en lui attribuant tout ou partie de la quotité disponible.  C’est notamment le cas en présence d’enfants handicapés à protéger,

Bon à savoir : s’il est interdit, comme nous l’avons vu, de partager des biens dont on n’est pas propriétaire en propre (ce qui exclut les biens en indivision, mais aussi ceux constituant la communauté maritale), il est toutefois possible de partager l’ensemble des biens des deux conjoints en fondant les biens communs et les biens personnels des époux. Cette opération peut se faire via ce qu’il est convenu d’appeler une « donation-partage conjonctive », ou dit plus simplement « conjointe ».

La masse successorale résultant des deux patrimoines sera partagée en équité entre les enfants. Fiscalement, l’opération présente l'intérêt de bénéficier d’un double abattement pour chaque enfant.

La donation « en avancement de part successorale » ou « en avance d’hoirie »

Son but est de favoriser temporairement certains héritiers (souvent un ou des enfants).

La donation par préciput et hors part :

Mode de donation idéal pour augmenter la part d’héritage du conjoint survivant.

La donation entre époux

La donation entre époux est plus connue du grand public sous le nom de « donation au dernier vivant »

Son but : accroître les droits du conjoint survivant qui verra ainsi sa part d’héritage augmenter.

Contrairement aux autres donations, elle déroge au principe de l’application immédiate puisqu’elle ne prendra effet qu’à la mort du premier conjoint. Dans la pratique, ce type de donation instaure l’extension de la quotité disponible. On parle alors de « quotité entre époux ».

Cette disposition laisse au conjoint survivant le choix entre 3 options :

  • dès lors où tous les enfants du défunt sont aussi ceux du conjoint survivant, celui-ci peut opter selon son gré soit pour la pleine propriété d'un quart de la succession, soit pour la totalité de l'usufruit.
  • La donation entre époux lui offre aussi la possibilité de recueillir la pleine propriété de la quotité disponible de la succession (à savoir la part qui n’est pas réservée de droit aux enfants).
Bon à savoir :  Ce type de donation peut être révoquée unilatéralement. Par contre, la donation entre époux est automatiquement rendue caduque par le divorce.

La donation au concubin

Comme le legs par testament, la donation entre concubins ne présente pas d’intérêt. En effet, elle subira la même taxation de 60 % après un abattement dérisoire de 1594 €…

Seules deux échappatoires pour les concubins : le PACS, et/ou l’assurance vie souscrite avant  la limite d’âge fixée à 70 ans.

La donation entre partenaires de PACS

La signature d’un PACS confère aux partenaires pacsés le même statut que celui des conjoints mariés. Ils seront donc exonérés de droit de succession.

Attention :  cependant, la loi impose une condition : que les biens aient été attribués au partenaire survivant par disposition testamentaire. Pas de testament = pas d’exonération de droits de succession.

Prenez attache avec votre notaire qui rédigera et enregistrera deux testaments croisés pour protéger les intérêts du partenaire survivant.

Les donations ordinaires :

  • Elles ont pour but de favoriser des « tiers » (parent éloigné, ami, association ou fondation, etc.) et s’imputent sur la quotité disponible.

Mentionnons pour mémoire ce qu’il est convenu d’appeler des « donations déguisées » qui sont destinées à tromper le fisc ou à favoriser un héritier de façon détournée.

Des aménagements des donations sont possibles

Dans le but de protéger donateur ou donataire, diverses clauses peuvent être introduites dans les actes de donation.

Mentionnons :

  • La conservation de l’usufruit : permet de se réserver l’usufruit, c’est-à-dire la jouissance du bien jusqu’à sa mort ; il est même possible de prévoir une clause de réversion de l’usufruit sur la tête du conjoint survivant ;
  • Le droit de retour conventionnel qui permet au donateur de reprendre possession du bien donné si le donataire vient à décéder prématurément.
  • L’instauration de conditions à charge du donataire(exemples : obligation de loger le donateur, obligation de lui verser une rente viagère, etc.)
  • L’interdiction d’aliéner le bien : interdit la vente du bien afin de protéger les intérêts d’un enfant dépensier ou addict au jeu, à la drogue, etc.
  • L’interdiction de mettre le bien en communauté: pour que le bien reste donné propre au donataire.
  • L’obligation d’emploi : pour que le donataire utilise les fonds donnés dans le but précis fixé par le donataire (achat d’un logement par exemple) ;
  • La clause de gestion : pour que le bien attribué à un petit-enfant mineur soit géré  par ses parents ou par un administrateur ayant la confiance du donataire ;
  • Etc.

Les avantages inhérents aux donations

Ils sont de 2 ordres :

1. Familial :

  • La donation-partage permet d’organiser sereinement sa succession en évitant les rapports conflictuels et une possible indivision pas toujours souhaitable ;

Elle permet aussi d’éviter le rapport d’éventuelles autres successions : transgénérationnelle avec l’accord des enfants, elle permet d’associer les petits-enfants en qualité de bénéficiaires d’une part, et ainsi d’éviter une double imposition.

  • La donation en avance d’hoirie rend possible le démarrage d’un enfant dans la vie en lui apportant une aide temporaire ;
  • La donation entre époux permet de protéger l’avenir de son conjoint.

2. Financier :

La donation permet très souvent un bénéfice pécuniaire appréciable en permettant d’anticiper le paiement des droits.

En effet, en fixant l’estimation des biens au jour de la donation et non au jour du décès, elle évite la taxation des plus-values éventuellement réalisée par le patrimoine.

La donation apporte enfin un avantage fiscal appréciable en permettant l’échelonnement de la transmission dans le temps et en faisant profiter de l’exonération de droits tous les 15 ans.

Le donataire peut ainsi faire une économie sensible et parfois même transmettre l’ensemble de son patrimoine sans payer de droit- sous réserve que cela soit fait avant l’âge limite de 80 ans.

Une bonne connaissance du fonctionnement des donations permet d’organiser la répartition de son patrimoine au mieux des intérêts des personnes qui vous sont chères.